Ce livre est à mettre entre les mains de ceux et de celles qui, sans être particulièrement des connaisseurs des relations internationales, souhaitent faire le point sur l'état du monde. Il ne s'agit pas d'un livre qui se voudrait embrasser l'ensemble des questions qui s'imposent sur une telle matière. Il s'agit plutôt d'une oeuvre de synthèse à partir des réflexions d'un ancien ministre des affaires étrangères, Hubert Védrine, aidé par deux co-auteurs, Adrien Abécassis et Mohamed Bouabdallah. C'est ce dernier, collègue de travail et ami, qui m'apprit son existence et attira mon attention et surtout ma curiosité. La thèse de ce livre est en même temps simple et compliquée. Prenant appui sur les évènements de ces vingt dernières années (surtout avec l'effondrement de l'ex URSS après 1989) les auteurs en profitent pour en tirer les conséquences et proposer, non pas une ou des solutions, mais une ligne de conduite dont tout gouvernement devrait, à mon humble avis, pouvoir tenir compte ou tout du moins s'en inspirer.
Les occidentaux ont cru, d'une certaine manière à leur victoire totale après l’effondrement du bloc soviétique. L'idéologie néo-conservatrice américaine qui voulait par tous les moyens imposer une démocratisation forcée du reste du monde, a conduit la politique internationale dans une impasse avec l'administration Bush. Reprenant le terme de philosophie grecque d'hubris (démesure de l'homme non conscient de ses limites) pour qualifier la politique des Etats-Unis, les auteurs dressent un tableau sobre et modéré mais sans concession de la période 1989-2008 dont l'après 11 septembre sera le tournant décisif en donnant aux ‘’faucons’’ une légitimité totale pour mener à bien leur guerre idéologique. A partir de cette analyse qui égratigne l'ensemble des acteurs de la période, droite et gauche compris, les auteurs proposent ce que j'appellerai un style comportemental. En repoussant la naïveté de ceux qui croient au rôle grandiloquent de l'ONU comme en refusant le cynisme des va-t-en guerres, ils prônent un réalisme de l’action au sens le plus noble. S'adressant aux occidentaux ils proposent de ne jamais céder sur les valeurs tout en continuant inlassablement à défendre leurs intérêts et en privilégiant le dialogue entre des Etats dont ils souhaitent, avec juste raison, la réhabilitation.
Le reproche que je ferais est peut-être qu'Hubert Védrine, reste prudemment sur une description de son action assez neutre, dont témoigne son point de vue sur le traité constitutionnel. Le style très diplomate (au PS « il y a beaucoup de talents ») m’a parfois fait sourire. On aurait aimé connaître le fond de sa pensée. Et d’autre part les quelques lignes sur les inquiétants déficits publics comme sur un appel entre les lignes, pour les prochaines élections, à un rapprochement au-delà de la gauche (vers où ?) m’a semblé trop court pour être vraiment crédible. Je suis en plus en désaccord sur ces points dont la démonstration me semble partiellement fausse, et surtout, inadaptée à l’esprit du livre.
Pour conclure je reprendrai en deux phrases synthétiques ce qui me semble être tout particulièrement les idées générales du livre. La diplomatie a été inventée non pour se congratuler, mais pour parler, si l'intérêt le commande, à des adversaires déterminés dont on rejette les valeurs ou les ambitions, mais qu'on ne peut faire disparaître.... Et l'intérêt des occidentaux est donc de se mettre d'accord sur une politique réaliste, claire, durable, adaptée à chaque pays émergents et je rajouterai, au reste du monde. Depuis la sortie et la ré-édition de ce livre Barak Obama a été élu président des Etats-Unis. A elle seule cette promesse d'avenir est un socle.
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